L’incontro tenutosi nella periferia meridionale tra funzionari di Hamas e Houthi ha suscitato proteste nelle file dell’opposizione a Hezbollah.
OLJ / Di Salah Hijazi
C’est à Beyrouth, dans la banlieue sud plus précisément, que s’est tenue, il y a une semaine, une rare rencontre entre des dirigeants du Hamas palestinien et des représentants des houthis yéménites. Révélée par l’AFP, cette réunion de « coordination » a été l’occasion pour le Hezbollah libanais de réunir ses deux alliés et acteurs-clés sur la scène régionale. En effet, en soutien au Hamas dans la guerre contre Israël, les houthis entravent le flux maritime en mer Rouge pour empêcher militairement les navires d’atteindre les ports israéliens. Une position qui a valu aux rebelles yéménites d’être traités comme des parias sur la scène internationale. Pas au Liban en tout cas, Beyrouth ayant été érigée en capitale du camp pro-iranien par son commandant en chef Hassan Nasrallah.
Selon l’AFP, citant des sources palestiniennes, une « importante réunion s’est tenue la semaine dernière à Beyrouth », à laquelle ont participé de hauts responsables du Hamas, du Jihad islamique et du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP, marxiste), avec des cadres houthis. L’occasion d’évoquer les « mécanismes de coordination de leurs actions de résistance en ce qui concerne la prochaine étape » de la guerre en cours depuis le 7 octobre entre Israël et le Hamas, selon la même source. Un responsable houthi ayant requis l’anonymat a pour sa part déclaré à l’AFP samedi que la réunion avait porté sur un « élargissement des affrontements et sur l’encerclement de l’entité israélienne, comme cela a été annoncé jeudi par Abdel Malek al-Houthi », le chef des houthis. Officiellement, le Hezbollah ne participait donc pas à la réunion. Toutefois, il est presque impossible qu’une réunion similaire ait eu lieu en plein bastion du parti chiite sans son implication.
Selon les informations de L’Orient-Le Jour, c’est bien le parti de Dieu qui a organisé cette rencontre de coordination, en amont de l’entretien la semaine dernière, toujours à Beyrouth, entre son secrétaire général Hassan Nasrallah et le chef adjoint du Hamas dans la bande de Gaza Khalil el-Hayya. Selon un communiqué du Hezbollah, le leader chiite a évoqué avec la délégation palestinienne « les derniers développements sur le terrain dans la bande de Gaza, en Cisjordanie et sur les multiples fronts de soutien », en allusion au Liban-Sud, mais surtout au Yémen. Contacté pour commenter, le Hezbollah n’a pas donné suite. De son côté, une source proche du Hamas confirme la tenue de la réunion, mais s’abstient de donner plus de détails.
Les Iraniens veulent la désescalade
L’entretien entre les Palestiniens et les rebelles yéménites à Beyrouth intervient à l’heure où le Hezbollah, craignant d’élargir les affrontements au Liban-Sud avec Israël, semble placer les houthis et le Hamas aux premiers rangs de la bataille. « Notre front restera en position de soutien à tout moment », a affirmé Hassan Nasrallah lors de son dernier discours. Une guerre totale avec Israël pourrait en effet s’avérer très coûteuse pour le parti chiite, puisqu’elle pourrait l’affaiblir tant à l’échelle locale que régionale, en plus de lui faire perdre tout le capital politique qu’il a accumulé depuis 2006. Avec tout cela en tête, le dignitaire chiite, pourtant la figure la plus influente de cet axe depuis la mort de Kassem Soleimani, chef des opérations extérieures des gardiens de la révolution iraniens, garde profil bas depuis le 7 octobre. Il préfère se cacher derrière le Hamas et surtout le Yémen, qu’il présente comme étant le plus important et le plus « courageux » des fronts de soutien. Il a même alloué à ses alliés yéménites des pans entiers de chacune de ses prises de parole depuis le 7 octobre. En organisant une réunion entre le Hamas et les houthis, le Hezbollah continue donc dans cette même logique, mais s’assure tout de même qu’il ne perdra pas son statut d’aîné des factions de la « résistance » au profit des houthis et du Hamas. Ces derniers montent de plus en plus en puissance, notamment dans la rue arabe, un peu à la manière du Hezbollah lors de la guerre de juillet 2006.
Cette stratégie est aussi celle de l’Iran. Quand bien même elle finance et forme ses obligés et alliés, la République islamique se garde une marge de manœuvre sous prétexte de leur laisser la liberté et le choix afin de ne pas s’aliéner encore plus la communauté internationale, et surtout de ne pas se retrouver face au risque d’un conflit élargi. Lors d’une réunion, encore à Beyrouth, en février, réunissant le successeur de Kassem Soleimani, Esmaïl Qaani, avec Hassan Nasrallah, ce dernier aurait affirmé qu’il ne voulait pas que Téhéran soit entraîné dans une guerre avec Israël ou les États-Unis et que le Hezbollah se battrait seul en cas d’élargissement du conflit au Liban-Sud. Selon nos informations, le général Qaani aurait insisté auprès de son hôte sur l’importance de la désescalade.
L’opposition crie au scandale
Mais alors que le Hezbollah fait de Beyrouth une place centrale pour l’axe pro-iranien, le camp « souverainiste » opposé au parti de Hassan Nasrallah y voit une dérive grave. « Le Hezbollah montre à tout le monde qu’il ne se soucie pas du tout de la souveraineté libanaise, accuse Achraf Rifi, député de Tripoli, contacté par notre journal. Pendant qu’il pilote sa propre diplomatie, accueillant à Beyrouth des groupes considérés comme terroristes, le gouvernement demeure impuissant ». L’ancien ministre de la Justice accuse même Haret Hreik d’avoir œuvré à affaiblir l’État central pour pouvoir mener librement sa politique. Même son de cloche du côté de Ghayath Yazbeck, député de Batroun, affilié aux Forces libanaises. « Non seulement le Hezbollah mène sa propre diplomatie, mais, pire encore, il accueille et protège les houthis, quand bien même il sait que cela risque de nuire à nos relations avec les États arabes, notamment l’Arabie saoudite », dénonce-t-il. Riyad a mené pendant de longues années une guerre contre les rebelles au Yémen, mais depuis le début de son processus de rapprochement avec l’Iran en mars 2023, semble les tolérer un peu plus. « Quoi qu’il en soit, les Arabes ne nous en voudront pas, espère M. Rifi. Ils savent que le pays est kidnappé par Téhéran. »